Étant une personne formidable et bourrée de qualités, il est évident que je me devais, dès mon plus jeune âge, de développer un apparent défaut, histoire de mettre un peu d’humanité à ma divinité (merci à ce romantique garçon qui m’a jadis écrit cette ligne).
Bien entendu, être ponctuelle ou fiable sont des qualités on-ne-peut-plus drabes tout comme être perfectionniste est un défaut à la con sans doute inventé par des étudiants en droit à la recherche d’un stage qui leur permettra de travailler 80 heures par semaine et enfin avoir, pour la première fois de leur vie, l’impression d’exister [fin du commentaire éditorial du jour]. Moi, en place et lieu de qualités ou de défauts à endormir n’importe quel insomniaque, j’ai plutôt opté pour un osti de caractère de cochon, ce qui me permet de passer le tiers de ma vie à m’obstiner pour mettre du beurre sur ma table et de passer un autre tiers de ma vie à m’obstiner avec mes amis pour le simple plaisir de la chose. L’autre tiers de ma vie, ça, hé bien… c’est ça.
Le pire défaut à mon avis n’est pas d’avoir un mauvais caractère mais plutôt de ne pas l’utiliser efficacement. Afin de faire passer toute cette rage et cette rancune qui m’habitent, j’ai appris avec les années qu’il était nécessaire de se trouver un bouc émissaire qui se ferait un plaisir d’absorber toute votre colère dès qu’un surplus se ferait sentir. Cette merveilleuse stratégie vous permettra d’épargner votre douce moitié, vos amis et votre famille qui se feront un plaisir de partager les rares moments où, en tant que caractériel, vous accrochez un sourire à votre visage.
Le plus souvent qu’autrement, le bouc émissaire se manifeste par lui-même, ce qui vous évite d’éplucher les petites annonces de Réseau contact à la recherche de celui-ci. Il sonne à votre porte, vous appelle ou vous écrit pour vous demander, que dis-je, vous supplier de le haïr de toute vos forces.
Mon bouc émissaire à moi s’est pointé le bout du nez pour la première fois en 2003. Il m’a d’abord téléphoné pour m’annoncer me faire croire que j’étais l’heureuse gagnante d’un téléphone cellulaire pour ensuite me rendre visite pour me donner le fameux téléphone et me faire signer un contrat de douze millions d’années avec afficheur – boîte vocale – trois cent options et dix mille minutes par mois.
Ma vie a alors basculé. Je venais de trouver en Rogers, l’homme qui allait me permettre d’utiliser efficacement mon fort tempérament, exhiber gratuitement tout mon mécontentement et me chicaner périodiquement pour des peanuts. Alors que je viens de passer (encore!) 10 minutes au téléphone avec un représentant de mon ami Rogers, je tenais du plus profond de mon cœur, à le remercier, au nom de tout mon entourage, pour toute cette rage désamorcée. Merci Rogers.
P.S. Pour tout les sensibles de ce monde qui aurait envie de plaindre les pauvres représentants du Service à la clientèle de mon ami Rogers, qui sont sous-payés et qui se font bassement engueuler par moi quand j’ai des frais administratifs de 25,00$ qui apparaissent sans raison sur ma facture, il faut vous rappeler mes amis que je suis une déesse directement descendue du ciel pour tous les proches de ces caractériels, étant sans doute moi-même la bouc émissaire de ces représentants.